Egypte
À moins de quatre semaines de la COP27 au Caire, ces accusations passent mal. Le groupe de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) avance que le gouvernement égyptien empêche les organisations de protection de l'environnement de son pays de conduire un travail "indépendant, engagé et des actions sur le terrain".
Ce dossier s'appuie sur une enquête du groupe HRW menée en juin dernier pendant laquelle, ses membres ont interrogé 13 activistes, scientifiques, journalistes et académiciens œuvrant sur des problématiques environnementales en Égypte. Ces témoins ont accepté de témoigner à condition que leurs noms n'apparaissent pas même si certains ont déjà quitté le pays pour des raisons de sécurité.
"Harcèlement et intimidations"
Les personnes interrogées indiquent que depuis l'arrivée au pouvoir du président Abdel Fattah al-Sissi en 2014, elles sont victimes de tactiques de harcèlement et d'intimidation, notamment des arrestations et des difficultés de déplacement au départ et à l'arrivée dans le pays. Des appels téléphoniques à leur domicile et contrôles de sécurité excessifs à l'aéroport du Caire ont été notamment rapportés et ont poussé certains à abandonner leur mission.
Des entraves au financement
Toujours selon les témoins d'HRW, le plus gros obstacle est la grosse difficulté à trouver du financement. En effet, dans la crainte d'être fichées ou d'être victimes de représailles, les entreprises égyptiennes donnent très peu à ces organisations qui sont donc obligées de faire appel à des donateurs étrangers.
Le problème est qu'en 2014, Abdel Fattah al-Sissi a modifié, par décret, le code pénal afin de punir de la prison à vie ou de la peine de mort toute personne ou organisme demandant, recevant ou aidant au transfert de fonds, qu'ils proviennent de sources étrangères ou d'organisations locales sans autorisation du pouvoir.
Ces nouvelles restrictions et les processus complexes qu'elles induisent auraient frappé de plein fouet les organisations indépendantes, notamment les groupes de défense de l'environnement, et leurs activités.
Des difficultés à obtenir un statut et à conduire des activités
Pour opérer légalement, ces organisations doivent être enregistrées auprès du ministère de la Solidarité sociale. Selon les témoins, cette déclaration exigée suite à une loi de 2019 sur les ONG, nécessite souvent des centaines de pages de documents compliqués. Un militante a déclaré qu'elle avait mis "un an et demi à essayer de comprendre comment enregistrer son ONG" et a finalement "laissé tomber".
Même une fois la déclaration faite, les témoins d'HRW déplorent la possibilité pour l'État de geler l'action légale de ces groupes s'il estime qu'elles ont franchi des lignes rouges.
Des autorisations seraient aussi nécessaires pour conduire des opérations sur le terrain en particulier dans les zones frontalières. La lourdeur administrative au sujet de la simple prise d'une photographie avec une équipement professionnel dans la rue est par ailleurs mentionnée.
Face à ses contraintes, de nombreux militants expliquent qu'ils réduisent leur activité. Et parfois restent au bureau bien que les sites d'information sur le web soient eux aussi surveillés et régulièrement fermés.
Certains ont tout de même salué l'organisation de cette conférence sur le climat en Égypte, une "opportunité positive" pour le pays, ils indiquent aussi que des militants ont été sondés par des fonctionnaires du ministère de l'Environnement et même recruté pour aider à la préparation de la COP27.
De maigres efforts pour d'autres qui rappellent que "la situation environnementale ne peut s'améliorer sans "amélioration de la liberté d'expression et de la situation des droits de l'homme".
Régulièrement sous le feu des critiques l'Égypte compte plus de 60.000 détenus d'opinion, selon des ONG.
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